samedi 9 juin 2012

Odon


Dans mon article du 30 octobre « Enseigner », (ça date !) je vous parlais de deux élèves auxquels je consacrais un peu plus de temps pendant les heures de cours : Njaka et Odon. Je vous disais aussi que j’aurais l’occasion de vous en parler durant l’année…
Pour Njaka, les présentations sont déjà faites (cf article du 14 décembre dernier) !
Pour Odon, l’année se termine, mais il n’est pas trop tard pour vous le présenter !

Odon est d’un caractère plutôt timide et s’est donc toujours très peu exprimé, tant en Malgache qu’en Français. Timidité probablement renforcée par le fait que contrairement à la majorité des gars ici, il ne maitrisait absolument pas le Français en arrivant ici. Vous comprendrez donc aisément qu’arriver dans un groupe où vos semblables parlent une langue que vous ne parlez pas, ça n’est pas très évident !
Pour vous donner une petite illustration, Odon a pendant quelques temps été surnommé « Moi n’a pas compris », phrase qu’il répétait assez régulièrement…vous comprendrez pourquoi !

Pendant cette année donc, j’ai été confronté, comme tous les profs j’imagine, à la différence de niveau dans ma classe. Que faire lorsque pour l’étude d’un même texte, certains essayent de comprendre le sens caché du texte et son message, tandis que d’autres ont déjà dû mal à comprendre son premier sens ? Il est très tentant de laisser en cours de route les élèves un peu plus en difficultés comme Odon, pour avancer plus rapidement et étudier des textes de plus en plus intéressants.

En fait, je ne compte plus les minutes passées pendant les pauses à expliquer à Odon les notions vues en cours et sur lesquelles je n’ai pas eu le temps de m’attarder. Au fur et à mesure de ces petits temps pris en plus, j’ai appris à connaître un peu plus Odon, à savoir si mes explications avaient porté leurs fruits, à deviner la question qu’il n’osait pas me poser et à y répondre avec des mots plus simples. J’ai appris à parler un peu plus lentement (pas de faux espoirs, pour vous, je ferai l’effort de vous parler toujours aussi vite !), à laisser les autres élèves s’ennuyer pendant quelques minutes pendant que je donnais quelques explications supplémentaires.
Lors des travaux en groupe, j’ai toujours été partagé entre le fait de mettre Odon avec des élèves plus à son niveau de manière à lui laisser la possibilité de s’exprimer et le fait de l’insérer dans un groupe d’un niveau plus élevé de façon à le stimuler un peu. En conséquence de quoi, j’ai opté pour les deux solutions, c’est-à-dire en alternant…

Ces deux derniers mois, Odon s’est mis à parler beaucoup plus, outre les cours de soutien que je lui donnais tous les samedis matins, il m’a demandé de prendre régulièrement une demi-heure avec lui pour parler…de tout et n’importe quoi, le but étant de progresser à l’oral. Les questions qu’il me posait se faisait plus nombreuses, preuve à la fois de ses progrès et de sa confiance.
Lorsque j’ai fait faire un taboo aux gars (merci au passage à Apolline qui m’a scanné et envoyé 300 cartes depuis la France…preuve que c’est aussi grâce à vous que je vis de belles choses ici), Odon s’en est tellement bien sorti qu’il a fait gagner son équipe !
A voir son intégration dans le foyer maintenant, le sens de la répartie qu’il commence à acquérir « tu parles ! » et les taquineries qu’il s’amuse à lancer à chacun, nul doute que cette année lui aura permis de progresser.

Les examens écrit et oral de Français se sont déroulés mercredi…à mon grand soulagement, tout le monde a passé avec succès l’oral ! Pourtant, sous le coup du stress, Odon s’était mis à parler en Malgache…
Pour les résultats de l’écrit, il faudra attendre juillet avant de savoir.
De la réussite d’Odon à ces écrits dépend également la réussite d’une part de ma coopé, à savoir ma mission d’enseignant.
En effet, si le résultat final est toujours l’œuvre de l’étudiant, son professeur s’associe généralement à celui-ci, preuve de son investissement auprès de l’élève…et c’est mon cas ! Odon a fait d’énormes progrès depuis le début de l’année et nous serions tous les deux déçus (lui plus que moi probablement) de voir que l’énergie que nous avons mis tous les deux pendant l’année ne soit pas récompensée !
C’est toujours bon pour l’égo de se dire que l’on a servi à quelque chose pendant l’année, même si tout le mérite dans le travail, les efforts et la persévérance reviennent à Odon…

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