Dans mon article du 30 octobre « Enseigner », (ça
date !) je vous parlais de deux élèves auxquels je consacrais un peu plus
de temps pendant les heures de cours : Njaka et Odon. Je vous disais aussi
que j’aurais l’occasion de vous en parler durant l’année…
Pour Njaka, les présentations sont déjà faites (cf article du
14 décembre dernier) !
Pour Odon, l’année se termine, mais il n’est pas trop tard
pour vous le présenter !
Odon est d’un caractère plutôt timide et s’est donc toujours
très peu exprimé, tant en Malgache qu’en Français. Timidité probablement
renforcée par le fait que contrairement à la majorité des gars ici, il ne
maitrisait absolument pas le Français en arrivant ici. Vous comprendrez donc
aisément qu’arriver dans un groupe où vos semblables parlent une langue que
vous ne parlez pas, ça n’est pas très évident !
Pour vous donner une petite illustration, Odon a pendant
quelques temps été surnommé « Moi n’a pas compris », phrase qu’il
répétait assez régulièrement…vous comprendrez pourquoi !
Pendant cette année donc, j’ai été confronté, comme tous les
profs j’imagine, à la différence de niveau dans ma classe. Que faire lorsque
pour l’étude d’un même texte, certains essayent de comprendre le sens caché du
texte et son message, tandis que d’autres ont déjà dû mal à comprendre son
premier sens ? Il est très tentant de laisser en cours de route les élèves
un peu plus en difficultés comme Odon, pour avancer plus rapidement et étudier
des textes de plus en plus intéressants.
En fait, je ne compte plus les minutes passées pendant les
pauses à expliquer à Odon les notions vues en cours et sur lesquelles je n’ai
pas eu le temps de m’attarder. Au fur et à mesure de ces petits temps pris en
plus, j’ai appris à connaître un peu plus Odon, à savoir si mes explications
avaient porté leurs fruits, à deviner la question qu’il n’osait pas me poser et
à y répondre avec des mots plus simples. J’ai appris à parler un peu plus
lentement (pas de faux espoirs, pour vous, je ferai l’effort de vous parler
toujours aussi vite !), à laisser les autres élèves s’ennuyer pendant
quelques minutes pendant que je donnais quelques explications supplémentaires.
Lors des travaux en groupe, j’ai toujours été partagé entre
le fait de mettre Odon avec des élèves plus à son niveau de manière à lui
laisser la possibilité de s’exprimer et le fait de l’insérer dans un groupe d’un
niveau plus élevé de façon à le stimuler un peu. En conséquence de quoi, j’ai
opté pour les deux solutions, c’est-à-dire en alternant…
Ces deux derniers mois, Odon s’est mis à parler beaucoup
plus, outre les cours de soutien que je lui donnais tous les samedis matins, il
m’a demandé de prendre régulièrement une demi-heure avec lui pour parler…de
tout et n’importe quoi, le but étant de progresser à l’oral. Les questions qu’il
me posait se faisait plus nombreuses, preuve à la fois de ses progrès et de sa
confiance.
Lorsque j’ai fait faire un taboo aux gars (merci au passage à
Apolline qui m’a scanné et envoyé 300 cartes depuis la France…preuve que c’est
aussi grâce à vous que je vis de belles choses ici), Odon s’en est tellement
bien sorti qu’il a fait gagner son équipe !
A voir son intégration dans le foyer maintenant, le sens de
la répartie qu’il commence à acquérir « tu parles ! » et les
taquineries qu’il s’amuse à lancer à chacun, nul doute que cette année lui aura
permis de progresser.
Les examens écrit et oral de Français se sont déroulés
mercredi…à mon grand soulagement, tout le monde a passé avec succès l’oral !
Pourtant, sous le coup du stress, Odon s’était mis à parler en Malgache…
Pour les résultats de l’écrit, il faudra attendre juillet
avant de savoir.
De la réussite d’Odon à ces écrits dépend également la
réussite d’une part de ma coopé, à savoir ma mission d’enseignant.
En effet, si le résultat final est toujours l’œuvre de l’étudiant,
son professeur s’associe généralement à celui-ci, preuve de son investissement
auprès de l’élève…et c’est mon cas ! Odon a fait d’énormes progrès depuis
le début de l’année et nous serions tous les deux déçus (lui plus que moi
probablement) de voir que l’énergie que nous avons mis tous les deux pendant l’année
ne soit pas récompensée !
C’est toujours bon pour l’égo de se dire que l’on a servi à
quelque chose pendant l’année, même si tout le mérite dans le travail, les
efforts et la persévérance reviennent à Odon…
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