mercredi 4 juillet 2012

Textes


Voici deux textes que j'aime beaucoup pour réfléchir sur ce qu'est le départ...

Un peu curieux me direz-vous : voici un texte sur la mort. Si j'avais lu ce texte tout d'abord dans le sens que l'auteur veut lui donner (mort = décès) et que je l'avais trouvé très beau, je n'ai pas pu m'empêcher de le relire ces temps-ci en ayant en tête le départ imminent auquel je me prépare.
La mort d'une aventure, d'un projet, d'une relation, tout simplement de quelque chose qui nous tenait à cœur et auquel il nous faut maintenant renoncer...
Triste de quitter les gens ici certes...mais heureux à l'idée de pouvoir encore vivre quelques moments à Madagascar, faits probablement de partages et de nouvelles rencontres, et à un peu plus longue échéance, heureux de voir se profiler à l'horizon les retrouvailles avec mon pays, ma famille et mes amis...
 
Je suis debout au bord de la plage.
Un voilier passe dans la brise du matin, et part vers l’océan.
Il est la beauté, il est la vie.
Je le regarde jusqu’à ce qu’il disparaisse à l’horizon.
Quelqu’un à mon côté dit : « Il est parti ! »
Parti vers où ? Parti de mon regard, c’est tout !
Son mât est toujours aussi haut,
Sa coque a toujours la force de porter sa charge humaine.
Sa disparition totale de ma vue est en moi, pas en lui.
Et juste au moment où quelqu’un près de moi dit : « Il est parti ! »
Il y en a d’autres qui le voyant poindre à l’horizon et venir vers eux s’exclament avec joie : « Le voilà ! »
C’est ça la mort !

WILLIAM BLAKE


Un petit extrait du Petit Prince qui m'a fait réfléchir sur notre intérêt à vivre des instants et des relations dont on sait que l'on devra un jour ou l'autre les mettre de côté...

[Le renard dit :]
– Ma vie est monotone. Je chasse les poules, les hommes me chassent. Toutes les poules se ressemblent, et tous les hommes se ressemblent. Je m’ennuie donc un peu. Mais, si tu m’apprivoises, ma vie sera comme ensoleillée. Je connaîtrai un bruit de pas qui sera différent de tous les autres. Les autres pas me font rentrer sous terre. Le tien m’appellera hors du terrier, comme une musique. Et puis regarde ! Tu vois, là-bas, les champs de blé ? Je ne mange pas de pain. Le blé pour moi est inutile. Les champs de blé ne me rappellent rien. Et ça, c’est triste ! Mais tu as des cheveux couleur d’or. Alors ce sera merveilleux quand tu m’auras apprivoisé ! Le blé, qui est doré, me fera souvenir de toi. Et j’aimerai le bruit du vent dans le blé…
Le renard se tut et regarda longtemps le petit prince :
– S’il te plaît… apprivoise-moi ! dit-il.
[...]
Ainsi le petit prince apprivoisa le renard. Et quand l’heure du départ fut proche :
– Ah ! dit le renard… Je pleurerai.
– C’est ta faute, dit le petit prince, je ne te souhaitais point de mal, mais tu as voulu que je t’apprivoise…
– Bien sûr, dit le renard.
– Mais tu vas pleurer ! dit le petit prince.
– Bien sûr, dit le renard.
– Alors tu n’y gagnes rien !
– J’y gagne, dit le renard, à cause de la couleur du blé.

Le Petit Prince, chapitre XXI, Antoine de Saint Exupéry.

Veloma


Ca y est. Le départ est là, tout proche. C’est le temps des « dernières fois » commencé il y a déjà quelques jours…
Dernier cours, dernière balade, dernier repas au foyer, dernier coucher de soleil, de nuit étoilée…Dernière fois où l’on voit ces visages, ces personnes que l’on a appris à découvrir et que l’on ne reverra probablement plus. Ces dernières fois où l’on ouvre grand les yeux pour être sûr de ne rien oublier, pour que le souvenir perdure le plus longtemps possible et que les visages, les paysages et les moments de partage nous donnent un élan capable de nous pousser le plus loin possible…
Il est venu le temps de partir. De dire au revoir. Des « au revoir » simples ou plus festifs, à la lueur d’une bougie ou serrés à 10 autour d’une table dans une pièce de 10m². Des « au revoir » au détour d’un chemin ou lors d’une discussion de 30 mn, des « au revoir » faits de chants toujours aussi magnifiques ou de larmes. Des « au revoir » propres à chacun faits de petits ou grands remerciements…à la façon malgache finalement à laquelle je suis maintenant habitué. 

Ghislaine, Céline, Marie-José, Micheline, Bienvenue,
Olivia, Françoise, Olive et Mireille.
Une partie de mes élèves chez les sœurs du Noviciat.
Un sens du service à toute épreuve, des remerciements à tout va et une gentillesse hors norme, les sœurs du Noviciat ont été pour moi une bouffée d'air lors des moments compliqués au foyer.
Je souhaitais passer leur dire "au revoir" l'espace d'1/2h : arrivé à 9h30, j'en suis reparti à 14h après avoir partagé une messe et un repas festif à leurs côtés !
Un cadeau, des chants...tout simplement magnifique ! Ce fut juste lorsqu'elles sortirent les guitares que je réalisais que mes cours n'avaient pas servi à grand chose...Ce fut l'occasion d'une belle rigolade avec l'assemblée !
Maman des trois filles, Beby, Ginau (un de mes
élèves au foyer), Mioura, moi, Hasina.
Des jeunes qui passent régulièrement au foyer.

  Beby, Hasina...Quelques cours de Français en soutien à droite à gauche, ce sont elles qui m'ont inculqué mes premières phrases en Malgache en début d'année...
Mioura, une petite fille pleine de vie, de rire et d'énergie ! Triste de me voir partir, Mioura m'a tout simplement offert...son nounours...
Les enfants se sont mis sur leur 31...décrassage
des pieds, beaux pantalons et tee-shirt :
la photo de départ est importante !



Les enfants du quartier...petits acteurs en herbe. Ceux qui ont mis un peu de vie au foyer ! Ça fait du bien d'avoir des fans ! Comment leur expliquer que je ne reviendrai pas avant longtemps et que non, il ne faut pas qu'ils m'envoient de texto, ça coûte trop cher...
Gâteau spécial Augustin lors du repas chez Zitanie






Même dans une petite pièce, les Malgaches savent recevoir et dire "au revoir"...
Un seul problème...quand l'apéro s'éternise (face à des sambosas de surcroit), il devient difficile d'honorer le reste du repas...

Devant le paysage du foyer...

Mais dire "au revoir", c'est dire également "au revoir" à tous ces lieux qui ont fait ma vie pendant une année...Nosy Longo (la petite île que vous voyez), le foyer, Diégo...
Il y aurait tant de photos à mettre, de personnes dont je ne vous ai pas parlé, de moments à raconter...
Mais tout comme la coopé, tout a une fin et il faut savoir s'arrêter...Veloma...